Lettre ouverte au Premier Ministre Garry Conille et au Directeur Général de la Police Normil Rameau
Objet: Demande d’asile
Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Directeur Général de la Police
Nous, citoyens de l’Artibonite, prenons la plume en ce jour pour vous adresser une demande formelle. Elle peut paraître insolite, mais elle est le reflet d’un désespoir profond et d’une indignation légitime face à la gestion inéquitable et déshumanisante de notre pays. Nous vous demandons aujourd’hui de nous accorder l’asile pour venir vivre dans l’arrondissement de Port-au-Prince.
Nous ne sommes pas dupes des réalités qui nous entourent. Il est clair que, pour vous et vos semblables, nous ne sommes pas des citoyens de première classe. Peut-être même pensez-vous que nous ne sommes pas dignes de partager les mêmes espaces de vie que ceux que vous aménagez avec soin dans la capitale. Cependant, en tant que citoyens que vous semblez reléguer au rang de citoyens de seconde zone, nous estimons qu’il est impératif que vous acceptiez notre requête : nous voulons vivre aussi, et nous revendiquons ce droit.
Dans votre arrondissement, vous concentrez tous les moyens de fonctionnement de l’État : équipements, ressources, infrastructures et sécurité. Pendant ce temps, l’Artibonite et d’autres départements sont laissés à l’abandon, condamnés à une misère inacceptable. Si vous refusez de partager avec nous ces moyens que nous finançons également, alors nous vous demandons l’asile, pour nous permettre de venir vivre là où, semble-t-il, seuls les privilégiés ont droit à une existence humaine.
Nous savons, hélas, que cette requête ne sera probablement pas accueillie avec bienveillance. Vous nous traquerez peut-être comme on traque nos compatriotes en République Dominicaine, comme des bêtes sans valeur. Mais, dans toute circonstance, l’homme doit avoir l’opportunité de vivre. Et si nous devons, pour vivre dignement, vous imposer notre présence à Port-au-Prince, alors nous le ferons.
Nous n’aspirons pas à un traitement de faveur. Nous exigeons simplement le droit à une vie décente, un droit que vous nous refusez en concentrant tout ce qui permet de fonctionner correctement dans un seul arrondissement. Cette centralisation abusive est inacceptable. Si vous n’êtes pas prêts à partager, nous vous contraignons par cette demande à nous accueillir dans votre arrondissement, car notre existence ne peut pas être réduite à de la survie dans un pays où seuls quelques-uns jouissent des bienfaits de l’État.
Il est temps de rééquilibrer les choses ou de faire face à la conséquence de vos choix : une demande d’asile massive de citoyens haïtiens dans la seule zone du pays où vivre semble encore possible.
Respectueusement,
Pour la population Artibonitienne :
Beken Petit-Homme
19 Septembre 2024
Citoyen de l’Artibonite